Isabelle Régner



Egalab laisse la parole à Isabelle Régner, Professeure des Universités au Laboratoire de Psychologie Cognitive (UMR CNRS 7290) et Vice-Présidente Egalité Femmes Hommes et Lutte contre les Discriminations à Aix-Marseille Université, pour nous expliquer comment les biais de genre engendre une sous-représentation des femmes dans le monde du travail.

Les plans d’action visant à promouvoir l’égalité entre les femmes et les hommes dans les instituts de recherche et l’enseignement supérieur se sont multipliés depuis plusieurs années et ont permis un certain nombre d’avancées. Toutefois, les inégalités demeurent en termes de recrutement, de promotion, d’accès aux postes les plus prestigieux, et de représentation dans les disciplines scientifiques dites STIM (Sciences, Technologie, Informatique, et Mathématique). Si les campagnes de sensibilisation et de communication, les chartes d'engagement, et les quotas sont des actions nécessaires, elles ne sont néanmoins pas suffisantes. Il est important de se tourner vers les résultats de la recherche scientifique qui montrent que ces inégalités sont en grande partie liées aux stéréotypes de genre, lesquels conduisent à davantage associer, encore aujourd'hui, les capacités de leadership, de management, et les compétences en Sciences aux hommes plutôt qu'aux femmes.


Les recherches ont permis de comprendre comment ces stéréotypes sont de nature à générer des biais implicites, c’est-à-dire des automatismes puissants acquis au fil du temps, qui sont présents chez la plupart des individus, femmes et hommes, et qui peuvent influencer les jurys pourtant rigoureux. Ces recherches nous renseignent également sur les actions à mettre en œuvre et les conditions de leur efficacité. Les données nous disent qu’il est nécessaire de proposer des formations qui permettent 1) de faire prendre conscience de l'existence de ces biais stéréotypés, 2) d'expliquer comment ces biais fonctionnent au niveau cognitif et quelles en sont les conséquences, et 3) de proposer des stratégies pour mieux contrôler ces biais et ainsi en réduire l'impact. Ces formations doivent être pérennes, visibles et soutenues officiellement par les institutions concernées, cibler le plus grand nombre, et faire l’objet d’une évaluation systématique pour savoir si elles produisent les effets attendus. La lutte contre les biais de genre n’est pas seulement une question d’engagement, de militantisme, ou de justice, c’est aussi un objet d’études scientifiques dont les résultats sont force de propositions.


Isabelle Régner, Professeure des Universités au Laboratoire de Psychologie Cognitive (UMR CNRS 7290) et Vice-Présidente Egalité Femmes Hommes et Lutte contre les Discriminations à Aix-Marseille Université