Emploi et précarité chez les femmes : Pourquoi ces notions ne sont pas contradictoires ?



La précarité touche de nombreuses femmes, même celles qui sont en activité. Nous reviendrons sur les nombreuses raisons qui expliquent cette situation.


La précarité est un terme que l’on associe aisément au chômage ou à la pauvreté résultant d’une inactivité. Pourtant, cette réalité n’est pas unique car la précarité touche également de nombreuses femmes en activité. Entre des temps partiels subis, temps fragmentés, émiettés, des emplois sous-payés, sans débouchés, ces femmes sont à la lisière de la pauvreté, voire de la grande pauvreté.


L’emploi des femmes

En un siècle, l’emploi des femmes a beaucoup évolué et s'est profondément transformé. Depuis le XXème siècle, les filles sont davantage scolarisées et leur réussite scolaire tout au long de leur parcours éducatif n’est plus à démontrer. C'est également le siècle où l'égalité des droits entre les femmes et les hommes se renforce : le droit de vote des femmes en 1944, la facilitation de leur insertion sur le marché du travail, les lois sur l'égalité professionnelle, etc. Les années 60 sont marquées par l’entrée massive des femmes sur le marché du travail et leur taux d’activité n’a cessé d’augmenté depuis.

L’ensemble des chiffres cités ci-après proviennent de l’étude 2019 « Vers l’égalité réelle entre les femmes et les hommes » (étude du secrétariat d’Etat chargé de l’égalité entre les femmes et les hommes). Selon cette étude, le taux d’activité des 15-64 ans en France est de 68,2 % chez les femmes et de 75,8 % chez les hommes. Si l’on prend en compte ces mêmes chiffres en Europe, les femmes sont en activité à 67,9 % contre 78,9 % pour les hommes.

En dépit de la forte augmentation du niveau d'éducation et de l'activité des femmes, les disparités professionnelles ainsi que les inégalités salariales n'ont pas disparu. L'écart entre les salaires masculins et féminins, qui s'était progressivement réduit, tend à stagner depuis le début des années 2000. En effet, à poste et compétences égales, l’écart de salaires entre les hommes et les femmes en 2015 est de 9%. En équivalent temps plein, cet écart atteint les 18,5%. Par ailleurs, les modes d'entrée et d'engagement des femmes dans l'activité professionnelle varient : les femmes sont sous-représentées parmi les cadres (17%) et sont majoritairement des employées (42,7%). Cette difficulté d'accès des femmes à des postes supérieurs est couramment appelé le « plafond de verre ».


Les facteurs de précarité

L’emploi des femmes est en constante évolution, il y a aujourd’hui une prise de conscience des inégalités, de nombreuses réformes, et pourtant ! De nombreuses femmes en activité vivent sous le seuil de pauvreté, et ceux, pour diverses raisons sociétales qui ne permettent pas d’atteindre l’égalité réelle entre les femmes et les hommes.

  • Le temps partiel est un élément clé de la situation précaire de certaines femmes. En France, près d’un tiers des femmes travaille à temps partiel en 2018 (29,3% des femmes actives contre 8,4% des hommes actifs). Ainsi, parmi les cinq millions d’emplois en temps partiel, 3,8 millions (soit 76 %) sont occupés par des femmes, une proportion qui s’est légèrement réduite depuis 2008 (elle atteignait alors 82 %).

  • La monoparentalité, qui concerne à 85% menées des femmes avec enfants, est un facteur qui a tendance à renforcer la précarité. En effet, lorsqu’une femme seule a plusieurs enfants à charge, cela peut renforcer ses difficultés de conciliation entre travail et vie familiale, voire le maintien dans l’emploi, surtout lorsque celui-ci est peu rémunéré et avec des horaires imposés. C’est pour palier à cette difficulté que les femmes s’orientent plus naturellement vers des emplois précaires : temps partiel, intérim, aide à domicile, ménage, etc.

  • Les stéréotypes sont également un frein à la carrière professionnelle des femmes. Alors qu’elles sont désormais plus diplômées que les hommes, les femmes éprouvent toujours des difficultés à accéder à l’emploi qualifié. Dès l’enfance, les filles sont assignées à des comportements et rôles encourageant la discrétion et la politesse. Les jeunes intériorisent ces stéréotypes au sein des métiers, ce qui engendre une non-mixité des filières et des professions. C’est le cas du secteur du numérique (85% des hommes et 15% des femmes) ou le secteur des sciences (72% d’hommes et 28% de femmes). Ces secteurs, particulièrement bien rémunérés, sont très peu envisagés par les jeunes filles qui restent cantonnées à des métiers souvent moins rémunérés et moins valorisés.

  • Ces différents éléments (écarts de salaires, instabilité des temps de travail, temps partiels, etc.) impactent les droits sociaux comme les retraites, qui en découlent. Ainsi en 2015, l’écart du montant de la pension moyenne de droit direct entre les hommes et les femmes était de 39,2 %. Ainsi, la précarité de ces femmes se poursuit quand vient le temps de la retraite.

Des initiatives et des pistes de réflexions sont en cours pour palier à ces inégalités. Le Laboratoire de l’Égalité a par exemple organisé une table-ronde sur la thématique « Femmes et précarité : état des lieux, enjeux et perspectives » le 8 octobre 2019. Début 2020, il proposera un « Pacte pour lutter contre la précarité des femmes », pour traiter de la précarité des femmes au rang de priorité dans les instances de décision publiques et privées.

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, le préfet de région organise, le jeudi 9 janvier 2020, la 3ème conférence régionale des acteurs de la prévention et de la lutte contre la pauvreté, dans le cadre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté. La conférence sera axée sur le thème « Construire ensemble les parcours d’insertion des personnes » avec une table-ronde spécifique sur la mobilité et les solutions de garde d’enfants comme moyens de lever les freins à l’emploi.